N-31
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Comme une odeur de pauvreté

Parution : Lecture : 2 minutes

Il y a peu, Antoine Combes partageait une "anecdote" personnelle qui a beaucoup fait réagir sur Twitter :

Premier tweet de Antoine Combes daté du 30 juin 2022 : Aujourd’hui c’est le DNB. A 7h50 ce matin, une de mes élèves m’appelle. Elle me dit qu’elle ne sait pas quoi faire car elle n’a pas d’habits (sic) pour venir au collège. Je lui réponds, un rien sidéré, qu’elle est grande et qu’elle peut se débrouiller. 1/n

Le thread a en particulier reçu de nombreux commentaires de personnes n'y voyant une l'histoire inspirante d'un prof dévoué... 😫

Quel désespoir que de voir se répéter ad nauseam la même scène irréelle de pompiers applaudissant celleux qui se tuent à lutter contre l'incendie avec un verre d'eau...

Le tweet suivant, en particulier, heurte un point sensible.

Tweet issu du même thread de Antoine Combes : Le trajet se fait sans un mot avec un odeur de tabac froid et de fringue mal séchée. J’avais lu un jour quelque part, dans Le Monde je crois, qu’un prof de banlieue parisienne appelait ça l’odeur de la pauvreté. Je lui donne mille fois raison. On arrive au collège. 8/n

Un jour, il y a une éternité, un petit bourge m'a dit que je puais l’humidité.

M'a "conseillé" d'acheter un sèche linge...

C'était pendant mon service, dans le resto où je bossais pour payer mes études.

J'avais à peine de quoi manger. Donc j'étendais mes fringue dans ma chambre U minuscule et délabrée pour économiser le séchage au lavomatique.

Des remarques débiles comme ça, j'en ai eu des tas

La patronne qui rigole de mon appétit alors que je dévore le plat de pâtes d'avant service. Elle me demande mon budget nourriture.

Ce plat de pâtes était le meilleur repas de la semaine.

Faut dire c'était un resto italien, donc c'était des bonnes pâtes 😅

Y eu ce mec à qui je demande, super honteux, quelques centimes qui me manquent pour acheter une baguette en fin de mois... et qui me réponds "ben alors, faut pas être misérabiliste comme ça, tiens tes centimes, allez, fais-moi un grand sourire".

Cet employé de bureau qui me dit qu'à mon âge il est encore temps de faire des études pour avoir un vrai boulot, alors que je ramasse de la laine de verre qui brûle ma peau, en plein soleil... pour payer mes études, justement.

Il avait d'ailleurs bien fait cette remarque à moi, plutôt qu'à mes collègues racisés du même âge juste à côté de lui ... J'imagine qu'eux ne méritaient pas de "vrai métier" selon lui...

Et je ne parle même pas de la méchanceté crasse de certains qui considèrent les gens comme des larbins.

J'ai un secret pour vous : ouai, y a des serveurs qui crachent dans votre soupe bouillante. C'est tjrs mieux que de se faire virer après vous l'avoir envoyée à la gueule.

Bref... Tout ça pour dire que l'ignorance (volontaire) de certains me sidèrera toujours. J'imagine que discuter avec des "nécessiteux" pour comprendre leur vie, ce serait déjà beaucoup trop d'efforts pour eux...

J'imagine d'ailleurs que certains, en me lisant, pourraient penser que je verse dans le misérabilisme.

Détrompez vous : j'ai été extrêmement privilégié !

Privilégié d'être né en France à une époque où il y avait encore un minimum d'état providence.

Des services sociaux qui fonctionnent.
Des HLM plus ou moins vivables.
Des bourses d'études et cité U correctes.
Une éducation publique acceptable.
Des petits boulots pour les jeunes.

En plus d'être, évidemment, un mec blanc, qui a grandi en grande partie dans des coins avec de bonnes écoles, MJC et bibliothèques, entouré de personnes qui ont ouverts pour moi les portes d'univers très différents.

À ceux qui pensent qu'il y a "ceux qui réussissent et ceux qui ne sont rien" : sans aucune aide, seuls les ultra-privilégiés réussissent.

Sans ces aides, je serais resté ce "rien".

Votre méritocratie est une ruine mythologique.

Alors que nos dirigeants en dispersent les derniers décombres, laissant crever les "sans-dents" la bouche ouverte, vous vous délectez de leurs "belle histoires si inspirantes" ?!

Les mots me manquent pour exprimer le dégoût que vous m'inspirez.

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